La Vallée de la Qadisha est l’un des plus importants sites d’établissement des premiers monastères chrétiens au monde, s’inscrivant dans un extraordinaire paysage accidenté. On trouve non loin les vestiges de la grande forêt de cèdres du Liban, très prisés jadis pour la construction de grands édifices religieux.
Le site de la vallée de la Qadisha est arrosée par le saint fleuve Qadisha célébré dans les Écritures. Les falaises rocheuses de la vallée de la Qadisha ont servi depuis longtemps de lieux de méditation et de refuge. La vallée renferme la plus forte concentration de monastères et d’ermitages remontant à la toute première phase de l’expansion du christianisme. Les principaux sont les monastères Saint-Antoine de Quzhayya, Notre-Dame de Hauqqa, Qannubin et Mar Lichaa. Cette vallée constitue un témoignage unique du centre vital de l’érémitisme maronite. Ses grottes naturelles creusées dans les collines quasi inaccessibles et décorées de fresques témoignent d’une architecture conçue spécifiquement pour les besoins spirituels et vitaux des anachorètes. Il existe également de nombreuses terrasses réalisées pour la culture des céréales par les moines, ermites et les paysans qui vivaient dans la région dont plusieurs sont toujours cultivées.
Liée à la Vallée de la Qadisha par des relations historiques et de contiguïté, la Forêt des cèdres de Dieu est le dernier vestige des forêts antiques et l’un des rares sites où pousse encore le Cedrus lebani, l’un des matériaux de construction très prisé dans le monde antique et cité 103 fois dans la Bible. Le cèdre (Cedrus lebani) est décrit dans les anciens travaux de botanique comme le plus ancien arbre au monde. Il était admiré par les israélites, qui le rapportèrent chez eux pour construire le premier et le second temple de Jérusalem. Les sources historiques indiquent que les célèbres forêts de cèdres commençaient déjà à disparaître à l’époque de Justinien, au VIe siècle apr. J.-C.
Beaucoup des grottes de la Qadisha occupées par des anachorètes chrétiens avaient été utilisées auparavant comme abris ou comme tombes, dès le paléolithique. Dès les premiers siècles du christianisme, la vallée sacrée servit de refuge à ceux qui cherchaient la solitude. Les maronites syriens y cherchèrent refuge lors des persécutions religieuses qui commencèrent à la fin du VIIe siècle ; ce mouvement s’intensifia au Xe siècle, après la destruction du monastère de Saint-Marun. Les moines maronites établirent leur nouveau centre à Qannubin, au cœur de la Qadisha, et les monastères qui combinaient érémitisme et vie communautaire se multiplièrent rapidement sur les collines environnantes.
À la fin des croisades, les grottes de la Qadisha furent le théâtre de terribles actions menées contre leurs occupants, les maronites. En 1268 et en 1283, les sultans mamelouks Baybars Ier et Qalaoun conduisirent des campagnes contre les grottes-forteresses et les villages environnants. En dépit de ces attaques, le monastère de Deir Qannubin devint le siège du patriarcat maronite au XVe siècle, et le demeura pendant cinq siècles. Au XVIIe siècle, la réputation de piété des moines maronites était telle que nombre de poètes, d’historiens, de géographes, de politiciens et d’ecclésiastiques européens visitèrent la Qadisha, et s’y installèrent même parfois. Toutefois, la vallée sacrée n’était pas seulement occupée par les maronites. Ses falaises rocheuses ont abrité d’autres communautés chrétiennes au cours des siècles : jacobites (orthodoxes syriens), melchites (orthodoxes grecs), nestoriens, Arméniens et même Éthiopiens.
Bcharré est située dans les montagnes à 1400 m d’altitude, au bord de la vallée de Qadisha. Dans l’Antiquité Bcharré était une ville phénicienne, où l’on exploitait le bois du cèdre. Les chrétiens maronites, fuyant la persécution, ont été attirés par les terrains montagneux et difficiles d’accès de Bcharré. Les croisés l’appelèrent Buissera, et elle devint le centre spirituel des maronites. Jusqu’à très récemment, les Bcharriotes parlaient encore l’araméen (Syriaque) qui est par ailleurs la langue liturgique maronite. À Bekaa Kafra, un village près de Bcharré, est né saint Charbel. Dans la vallée de Qadisha, au monastère d’Elishaa, a vécu le père Antonios Torbey, connu pour sa bienveillance miraculeuse, et d’autres saints durant l’Histoire. Bcharré est aussi le lieu de naissance du célèbre poète, peintre et sculpteur Khalil Gibran.
Durant la guerre civile libanaise, Bcharré était le bastion de la résistance chrétienne. Bcharré est d’ailleurs le lieu d’origine de Samir Geagea, personnage important dans la guerre civile libanaise.