A. Histoire de Bocas del Toro
Bocas del Toro est une province du Panama, qui consiste en un archipel composé de 9 îles. La capitale de la province se nomme aussi Bocas del Toro et est située sur l’île de Colon, à 40 km de la frontière avec le Costa Rica. Le nom de « Bocas del Toro » aurait été donné par Christophe Colomb, à la vue du gros rocher, en forme d’un taureau couché, sur l’île Bastimentos, avec en bruit de fond le bruit des vagues mugissant comme un taureau. On dit aussi que le dernier cacique (chef indigène) de la région était connu sous le nom de « Boka Toro ».
Lorsque Christophe Colomb arrive à Bocas del Toro le 6 octobre 1502, lors de son quatrième et dernier voyage, il baptise les trois premières îles Isla Colon (île Colomb), Isla Cristóbal (baie Christophe) et Bahía de Almirante (baie de l’amiral). Au 17ème siècle, l’archipel devient un repère de pirates. Les boucaniers y réparent leurs navires , se nourrissant des tortues de mer trouvées sur les plages. Les populations autochtones de Bocas del Toro vont être anéanties par les guerres et les maladies apportées par les colons, espagnols d’abord, puis huguenots français aux 17è et 18è siècles. Au 19e siècle, de riches aristocrates arrivent à Bocas avec leurs esclaves noirs, en provenance des Etats-Unis, de même que des familles écossaises et anglaises venues, toujours avec leurs esclaves, des îles de San Andrés et Providencia, en Colombie, pour échapper aux impôts qu’ils trouvent excessifs. Ils achètent aux Indiens autochtones les tortues vivantes et leurs carapaces, le cacao, les noix de cajou, … Lorsque l’esclavage est aboli en 1850, les Noirs restent sur place, vivant de pêche et d’agriculture. A la fin du 19ème siècle, les Noirs jamaïcains arrivent et s’emploient dans les plantations de banane. C’est en effet en 1890 que trois frères américains arrivent à Bocas del Toro et créent la Snyder Brothers Banana Company. En 1899, la United Fruit Company s’implante à Bocas, prend le contrôle de l’entreprise de Snyders, et crée de vastes plantations qui s’étendent sur toute la péninsule. Aujourd’hui United Fruit, intégrée dans la multinationale Chiquita Brands International, exporte près d’un million de tonnes de bananes par an.
Bocas del Toro possède une culture multi-ethnique très riche (indienne, espagnole, africaine, …) que l’on retrouve dans ses traditions, ses coutumes, sa gastronomie, sa musique, ses danses et autres manifestations.
B. Les esclaves africains
Les premiers esclaves noirs arrivent à l’Isthme de Panama dans l’expédition du Gouverneur Diego de Nicuesa, qui fonde Nombre de Dios.
De même, quand Pedrarias Dávila fonde la Ville de Panama le 15 août de 1519, il « utilise » des esclaves noirs pour édifier les premiers bâtiments. Quand la Couronne sanctionne comme illégal le traitement des indigènes, elle autorise le commerce d’esclaves noirs pour les remplacer dans les propriétés agricoles et les mines.
Panama devient, avec Quito, le Pérou et le Vénézuela, un des centres les plus importants de redistribution des esclaves, une fois ceux-ci arrivés d’Afrique à Cartagena de Indias (Colombie), le plus grand port négrier du Nouveau Monde. Les esclaves noirs furent utilisés principalement pour le transport des marchandises qui passaient par le Camino Real ou les Chemins des Croisements. En raison de la cruauté avec laquelle ils étaient traités, le marronage des esclaves fut important. Deux royaumes marrons furent créés : le premier en 1548 avec à sa tête Bayano 1er, le second en 1549, dans le Golfe de San Miguel, dirigé par Felipillo 1er. Les cimmarons collaborent activement avec les pirates et les corsaires, en leur servant de guides. L’esclavage au Panama est officiellement aboli le 21 mars 1851. Cependant, il est maintenu durant l’époque où Panama est uni à la Grande Colombie. Le Général José Hilario López Valdés, Président de la République de la Nouvelle-Grenade (Colombie) fait voter, le 21 mars 1851, la loi qui abolit l’esclavage.
Au 19è siècle, les afropanaméens arrivent au Panama, en une deuxième vague venant des Caraïbes pour construire le canal. Des milliers de travailleurs carribéens (de la Jamaïque surtout mais aussi de la Barbade, de Trinidad, de la Guyane, de Saint Kitts, Sainte Lucie, Martinique, Curaçao, Guadeloupe et Saint Vincent) participent à la construction du canal de Panama.
C. Les afro-panaméens aujourd’hui
Les afropanaméens représentent, selon les estimations, entre 20 et 50 % de la population. Ils sont particulièrement présents dans les provinces de Colon, Darien et Panama.
Ils ont donné à leur pays :
– des écrivains : Carlos Guillermo Wilson, Joaquin Beleno.
– des présidents du Panama, d’ascendance africaine : Carlos A. Mendoza (1910), Ramón Valdés – 1916-1918, Tomás Gabriel Duque (1924 – 1928), José Dominador Bazán (1960-1964), Arístides Royo (1978-1982), Jorge Illueca (1984), Manuel Solís Palma y Francisco Rodríguez (1985-1989).
– des musiciens : Camilio Azuquita, maître panaméen de la salsa).
– des sportifs : Irving Saladino (médaille d’or olympique en saut), Lloyd Labeach (deux médailles de bronze en cyclimse), Armando Dely Valdés (footballeur), Julio César Dely Valdés (footballeur), Jorge Dely Valdés (footballeur), Roberto Brown (footballeur), Felipe Baloy (footballeur), Luis Tejada (footballeur), Panamá Al Brown (boxeur), Eusebio Pedroza (boxeur), Hilario Zapata (boxeur), Ismael Laguna Meneses (boxeur), Guillermo Jones (boxeur), Rolando Blackman, Rod Carew (baseball), Benjamin Oglivie (baseball), Mani Sanguillen (baseball), Mariano Rivera (baseball), Roberto Kelly (baseball), Ruperto Cooper (baseball), Ivan Murrel (baseball), Orlando Miller (baseball), Sherman Obando (baseball), Winston Brown (baseball), Francisco Chico Barahona (baseball), Vicente Foster (baseball), Reynaldo COCO Sharp (baseball).
La Plateforme Politique des Afro Pänaméens, présenté en novembre 2003, propose un certain nombre de mesures en faveur des afro-descendants. Il indique qu’« il est surprenant qu’au Panama qui est un creuset racial, il n’y ait aucun ministre noir, que les prisons soient remplies de noirs, que dans les stéréotypes, les délinquants aient la peau noire et que les cols blancs ne sont jamais des noirs ».
Certains pensent que la Constitution nationale qui promulgue l’égalité de tous les panaméens, quelque soit leur race, démobilise la population noire qui reste fragmentée en ce qui concerne ses intérêts. Ceci expliquerait que, malgré plus de cinq siècles de présence et de contribution au développement national et à la construction d’une société multiethnique et pluriculturelle, les afro panaméens continuent de souffrir massivement de la pauvreté, du chômage et d’autres maux sociaux.
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