Trinidad 1/8 : Histoire

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La géologie du pays (soudé au continent sud-américain jusqu’en – 11 000 et devenu insulaire en – 8 000) ne peut avoir manqué d’influer sur sa préhistoire. Plusieurs ethnies amérindiennes appartenant au groupe linguistique des Caraïbes (Yao, Nepuyo, Carinepagoto) ou des Arawaks (Lokono, Warao, Shebayo ou Salvaio) s’étaient établies à Trinidad & Tobago. On recensait en 1593 plus de 35 000 de ces Amérindiens. Toutes ces ethnies pratiquaient une agriculture à base de manioc et de racines et complétaient leur alimentation par les produits de la pêche. Beaucoup de toponymes ont conservé leurs noms d’origine : Caroni, Oropouche, Tamana, Aripo, Arima, Aripo, Paria, Arouca, Caura, Tunapuna, Tacarigua, Couva, Mucurapo, Chaguanas, Carapichaima, Guaico, Mayaro, Guayaguayare, etc. L’île de la Trinité servait de transit pour ces peuples entre l’Amérique du Sud et les Caraïbes.

Christophe Colomb débarque sur l’île le 31 juillet 1498, lors de son troisième voyage, et la baptisa Trinidad en l’honneur de la Sainte Trinité. Quant à l’île de Tobago, son nom pourrait provenir du mot amérindien taïnos, «tabaco» ou «tabago» modifié en «tobago». Trinidad devient une colonie espagnole en 1532. A la faveur de la guerre de Hollande, les français prennent Trinidad aux espagnols et Tobago aux hollandais. Le traité de Nimègue de 1678 entérine la présence française.

En 1783, le roi d’Espagne Charles III autorisa l’arrivée de travailleurs étrangers à Trinidad pour qu’ils puissent combler la main-d’œuvre manquante. De nombreux colons français vinrent alors s’établir à Trinité, avec leurs familles et leurs esclaves. Bien que Trinidad soit une possession espagnole, la culture française sera prédominante. C’est ce qui fera dire à Eric Williams, l’historien et premier ministre (de 1962 à 1981) : «L’Espagne règne, mais la France gouverne». La reprise en 1797 de Trinidad et Tobago par les anglais leur sera officiellement reconnue par la Paix d’Amiens en 1802. Tobago fut à nouveau occupée par les Français de 1783 à 1815, pour rester ensuite définitivement anglaise. En 1899, Tobago est rattachée à Trinidad pour ne former plus qu’une seule colonie. Après l’abolition de l’esclavage en 1838, le pouvoir colonial britannique recourt à une importante main-d’œuvre asiatique sous contrat : entre 1838 et 1917, 500 000 Indiens arrivent à Trinidad. Chaque année, le Indian Arrival Day commémore leur arrivée à Trinidad. En 1962, après la dissolution de la Fédération des Indes-Occidentales créée en 1958, les îles de la Trinité et de Tobago deviennent indépendantes au sein du Commonwealth.

Le People’s National Movement (PNM), parti de la communauté noire, détient la majorité à la Chambre des représentants à partir de 1961. Dr Eric Williams, fondateur du PNM et considéré comme le « père de la nation », devient Premier ministre. L’opposition est constituée alors surtout par les Indiens, descendants d’une main-d’œuvre importée de l’Inde après l’abolition de l’esclavage, en 1838. La bipolarisation de la vie politique sur des clivages ethniques et la montée du chômage provoquent en 1970 des émeutes de Noirs (se réclamant du mouvement « black power » et de l’Américain d’origine trinidadienne Stokely Carmichael). L’opposition boycotte les élections de 1971, et de nouveaux troubles raciaux éclatent la même année. Eric Williams les surmonte grâce à l’aide des États-Unis, qui conservent encore une base navale dans l’île, à Chaguaramas. Eric Williams reste en poste de 1962 à 1981 et il faudra attendre le milieu des années 1980 avant de voir une autre formation, l’United National Congress (Alliance nationale pour la reconstruction) prendre le pouvoir. Les deux partis dominent donc la scène politique : le PNM, dont l’électorat est majoritairement d’origine africaine, et l’UNC, dont l’électorat est surtout indien. Les deux partis s’accusent régulièrement d’instrumentaliser les différences ethniques et religieuses et d’avoir aggravé la situation économique et sécuritaire quand l’autre était au pouvoir.

À la mort de Williams, en 1982, le ministre de l’Agriculture, George Chambers, fut nommé premier ministre et dirigeant du PNM. Lors des élections de 1986, la National Alliance for Reconstruction, le principal parti d’opposition, soutenu par la communauté indienne, remporta 33 sièges sur 36 à la Chambre des représentants, et Arthur Napoleon Raymond Robinson fut nommé premier ministre. En juillet 1990, plus de 100 militants musulmans firent exploser le quartier général de la police, s’emparèrent du Parlement et, lors d’une tentative de coup d’État, gardèrent plusieurs jours en otage Robinson, ainsi que d’autres membres du gouvernement. En décembre 1991, le PNM remporta les élections, et Patrick Manning fut nommé premier ministre. Basdeo Panday, lui succéda en novembre 1995, tandis que Robinson devint président en mars 1997. En décembre 2000, l’UNC, le parti que Basdeo Panday avait fondé en 1989, remporta les élections législatives.

De nombreuses accusations de fraude conduisent à de nouvelles élections en décembre 2001 puis en octobre 2002. Le PNM s’impose définitivement, en partie grâce aux soupçons de corruption pesant sur Panday. En février 2003, George Maxwell Richards remplace R. Robinson à la présidence de la République. En perte de vitesse en raison notamment de nombreux scandales politico-financiers, P. Manning et son parti sont battus aux élections du mois de mai 2010 par le Partenariat du Peuple, alliance de cinq partis d’opposition dont l’UNC, conduite par Kamla Persad-Bissessar– la première femme (d’ascendance indienne tout comme son prédécesseur à la présidence du parti B. Panday) à prendre la tête du gouvernement – qui s’engage à lutter en priorité contre la corruption et la violence mais aussi à surmonter les clivages ethniques. Élu par le parlement après accord entre les partis, le nouveau président Anthony Carmona entre en fonctions en mars 2013.

Membre de la Communauté (et du marché commun) des Caraïbes (CARICOM) depuis 1973 et de son Marché unique (Caricom Single Market and Economy, CSME) depuis 2006, Trinité-et-Tobago est aussi l’un des États fondateurs, en 1995, de l’Association des États de la Caraïbe (AEC, dont le secrétariat général est à Port of Spain) et abrite depuis 2005 la Cour caribéenne de Justice (CCJ). En avril 2009, Port of Spain a accueilli le Ve sommet des Amériques réunissant les chefs d’État et de gouvernement de 34 pays membres de l’Organisation des États américains (OEA).

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