UNE HISTOIRE MILLENAIRE
La Syrie (170 000 km2, 22 millions d’habitants dont 90 % de musulmans) comprend trois grandes entités : une chaîne montagneuse fertile court le long de la côte méditerranéenne (200 km) et de la frontière libanaise, une vaste plaine irriguée par l’Oronte entre Homs et Alep et un désert ponctué d’oasis dans le triangle Est du pays et représentant 60 % du territoire.
Tout au long de son histoire, la Syrie a été l’objet de la convoitise des empires régionaux et même plus lointains (européens) et a dû mener un combat permanent pour défendre sa souveraineté.
1. Antiquité
Durant l’antiquité (du 17 au 13è siècle avant JC), la Syrie, peuplée de Cananéens (sédentaires) et de Phéniciens (commerçants) est un nœud commercial entre la Méditerranée et l’Inde. Au 13è siècle avt JC, les Égyptiens et les Hittites se partagent la Syrie, qui devient un pays de migration avec les Hébreux, les Philistins, les Babyloniens, les Egyptiens, les Assyriens, les Perses et les Macédoniens.
C’est en 1929 que l’on découvrit Ougarit. Elle n’était alors connue qu’à travers les archives d’Amarna (Egypte), capitale du roi hérétique Akhénaton (1400 ans avant notre ère). Cette cité a offert le premier exemplaire d’un alphabet complet de l’histoire de l’humanité, sous forme de 30 signes cunéiformes gravés sur une une petite tablette d’argile de trois centimètres de long et conservée au musée de Damas ?
2. Domination grecque puis romaine
À la mort d’Alexandre le Grand en 323 avant J.C., son lieutenant Séleucos fonde le royaume séleucide, sur la vallée de l’Oronte, entre le Golfe persique, la Méditerranée et la mer Noire, dont la capitale est Antioche. Le royaume Séleucide devient le royaume de Syrie, s’étendant de la mer Égée à l’Inde. En 66 avant Jésus-Christ, Pompée entreprend de soumettre l’Orient et la Syrie passe aux mains des Romains. Constituée de cinq provinces, la Syrie romaine connaît une période de grande prospérité, avec les riches terres agricoles produisant des olives et du blé. Entre 395 et 634, la Syrie sera rattachée à l’Empire romain d’Orient, dont Byzance est la capitale.
3. La Syrie arabe puis ottomane
Au 6ème siècle après JC, la Syrie est envahie par les Perses. Héraclius les repousse mais ne parvient pas à endiguer l’arrivée des Arabes en 636. La dynastie des Omeyades (640-750) établit le centre du califat à Damas. En 750, la dynastie des Abbassides (descendant d’Ali, l’oncle du prophète) établit sa capitale à Bagdad. 37 califes abbassides régneront de 750 à 1258. En 1098, les croisés chassent la dynastie des Seldjoukides au service des Abbassides, et prennent Jérusalem et la Syrie. En 1187, Saladin reprend le contrôle de la Syrie, qui passe sous le contrôle de l’Égypte en 1200.
Après la prise de Constantinople en 1453, la domination ottomane s’exerce sur la Syrie pour quatre siècles. La Syrie, devenue province de l’Empire ottoman, est partagée en quatre pachaliks : Damas, Tripoli, Alep, et Saïda. En 1832 le vice-roi d’Égypte Mehemet Ali, qui s’est affranchi de la tutelle des Turcs, conquière la Syrie mais, en raison des soulèvements et de la réaction des puissances européennes, abandonne ses prétentions sur la Syrie en 1840.
4. L’émergence du nationalisme arabe en Syrie
En 1908, les Jeunes Turcs font rétablir la Constitution de 1876, favorables aux arabes de l’Empire ottoman, mais, en raison de la perte des Balkans et de l’annexion de la Tripolitaine par les Italiens, basculent dans un nationalisme turc qui, dans les provinces arabes, impose la langue turque. En réaction, les Arabes créent des sociétés secrètes comme al-Fatat fondée à Paris et al-Khatamiya fondée à Istanbul. Le 17 juin 1913, ces sociétés tiennent un Congrès arabe à Paris, où s’illustrent les Syriens qui réaffirment leur attachement à l’Empire ottoman tout en réclamant que les Arabes puissent jouer un rôle plus grand dans la vie publique. Ce congrès est la première véritable manifestation du nationalisme arabe laïc.
Le 5 novembre 1914, l’Empire ottoman entre en guerre aux côtés de l’Allemagne, tandis que les nationalistes arabes choisissent de soutenir les Anglais et les Français. L’anglais MacMahon promet un royaume arabe indépendant au chérif Hussein, dirigeant de la région du Hedjaz et gardien de la Mecque et de Médine, à condition que Hussein aide les anglais à chasser les ottomans du Moyen-Orient. Au même moment, anglais et français signent les accords Sykes-Picot où ils planifient de se partager le Moyen-Orient une fois libéré de la présence ottomane. Le chérif Hussein déclenche la grande révolte arabe destinée à libérer les provinces arabes de l’Empire. Fin septembre 1918, les troupes arabes de l’émir Fayçal, fils du chérif Hussein, entrent à Damas qui a été évacué quatre jours plus tôt par l’armée ottomane. Le 5 octobre 1918, un gouvernement arabe est formé, présidé par Ali Rida Rikabi. Au moment où la teneur des accords Sykes-Picot et de la déclaration Balfour (à la base de la naissance d’Israël) leur est révélée, les Arabes de Syrie tentent de hâter l’avènement de leur Etat. Lors de la conférence de la paix qui s’ouvre le 18 janvier 1919 à Paris, Français et Britanniques se partagent les territoires arabes, sans prendre en considération les revendications de la délégation menée par Fayçal et refusent de reconnaître le royaume indépendant de Syrie proclamé le 8 mars 1920 par le Congrès général syrien.
5. La Syrie sous mandat français
Les Français décident alors d’imposer militairement le mandat qui leur a été octroyé par la SDN sur la Syrie. Les troupes arabes sont battues par le général Gouraud à Maysaloun, à 20 km de Damas. Le 25 juillet 1920, les Français occupent Damas et ordonnent à Fayçal de partir. La division de la Syrie a lieu très vite, un mois après Maysaloun, donnant naissance à quatre Etats : le Grand Liban, détaché de la Syrie et proclamé le 1er septembre 1920 ; l’Etat d’Alep ; le territoire alaouite, placé sous l’administration directe de la France ; l’Etat de Damas ; le sandjak d’Alexandrette, province autonome placée sous l’autorité française ; l’Etat druze indépendant. Si les maronites et les alaouites sont satisfaits du morcellement qui a été fait, le reste de la population s’y oppose. La France tente de brider par la violence les troubles qui éclatent dans toutes les régions. Puis elle décide de réunir les Etats de Damas, d’Alep et le territoire alaouite dans le cadre d’un Conseil fédéral.
Du 18 juillet 1925 au printemps 1927, la grande révolte syrienne est déclenchée par les druzes commandés par Sultan al-Atrache, réprimée par la loi martiale française et le bombardement de Damas en octobre 1925 et en mai 1926. Le 24 avril 1928, une Assemblée Constituante dominée par les nationalistes du Bloc national voit le jour à l’issue d’élections et élabore un projet de constitution qui établit en Syrie une République parlementaire. En réaction, l’Assemblée constituante est dissoute par le haut-commissaire français. qui promulgue une autre Constitution. En 1932, Michel Aflak et Salah Eddine Bitar reviennent en Syrie, après quatre ans passés à la Sorbonne, et fondent le parti Baath dont les principes sont : libération nationale, Etat solide capable de faire entrer la Syrie dans la modernité, Nation arabe, Unité.
Les nationalistes remportent les élections de novembre 1936 et proposent un projet de traité qui prévoit d’accorder à la Syrie son indépendance dans un délai de trois ans ; les Etats alaouite et druze sont réintégrés à l’Etat syrien. Le 14 décembre 1938, le sénat français rejette le projet de traité ; l’Assemblée nationale syrienne est à nouveau dissoute, la Constitution suspendue et les nationalistes réprimés.
Le 23 juin 1939, la France cède le Sandjak d’Alexandrette à la Turquie, contre un pacte de non-agression. Le Parti de la Résurrection Arabe (Hizb al-Baath al-Arabi) fondé par Zaki Arsouzy mène des actions anti-françaises. Le 8 juin 1941, les troupes britanniques et celles de la France Libre entrent en Syrie et y proclament l’indépendance que le général de Gaulle n’est pas disposé à reconnaître. Contraint par les Anglais, il accepte la tenue d’élections au cours de l’été 1943, qui sont remportées par le Bloc National. A la suite des émeutes nationalistes de mai 1945, les troupes françaises quittent définitivement la Syrie le 17 avril 1946.
6. La Syrie indépendante – Naissance du parti Baath
Le 27 janvier 1947 a lieu à Latakieh la réunion préparatoire au congrès constitutif du parti Baath, auquel Aflak et Bitar réussissent à gagner les membres du Baath al-Arabi fondé par Zaki Arsuzy en 1940. Ils sont dans leur grande majorité alaouites et leur dirigeant, Wahib Ghanem, accepte la fusion à condition que la formation élargie adopte une orientation encore plus socialiste. Le congrès Baath naît le 7 avril 1947, date de la fin du congrès.
Le 14 mai 1948 est proclamé l’Etat d’Israël. Le choc est immense en Syrie où la Palestine est toujours considérée comme la Syrie du Sud, et l’Etat syrien participe à la première guerre israélo-arabe qui s’achève par un armistice avec Israël signé le 20 juillet 1949.
7. La période des coups d’Etats militaires
Le premier coup d’Etat met au pouvoir, le 30 mars 1949, Husni Zaïm qui affiche sa volonté de réparer l’échec de la première guerre israélo-arabe. Les relations entre le Baath et Husni Zaïm se dégradent quand ce dernier annonce la dissolution de tous les partis politiques et se rapproche ouvertement des Etats-Unis. Michel Aflak et d’autres dirigeants du parti Baath sont arrêtés. Husni Zaïm rapproche la Syrie de l’Egypte et de l’Arabie saoudite. Voyant que la politique américaine est en train de triompher, la Grande-Bretagne appuie le coup d’Etat du colonel Sami Hennaoui le 14 août 1949. Sami Hennaoui tente de réaliser une union syro-irakienne, mais il est renversé le 19 décembre 1949 par le colonel Adib Chichakli. A la fin de l’année 1951, l’agitation qui règne en Syrie entraîne l’établissement de la dictature par Adib Chichakli. Le 29 décembre 1952, Michel Aflak, Salah Bitar et Akram Hourani sont arrêtés mais parviennent à s’enfuir à Beyrouth, où ils fusionnent leurs mouvements pour former le Parti Baath Arabe Socialiste (PBAS), puis s’installent en Italie où ils resteront jusqu’au 9 octobre 1953, date de leur retour en Syrie. Le 25 janvier 1954, Aflak, Bitar et Hourani sont de nouveau arrêtés et accusés d’avoir soutenu la révolte qui s’est produite dans le Djébel druze.
En février 1954 , le régime de Chichakli est renversé par le colonel Mustapha Hamdoun qui permet le rétablissement de l’Assemblée élue en 1949, le retour du président Kouatly et la formation d’un gouvernement dirigé par Sabri Assali. Aflak, Bitar et Hourani rentrent d’exil. Les élections législatives des 24-25 septembre 1954, consacrent la montée du parti Baath.
Dans les premiers mois de 1955, la Syrie refuse d’adhérer au Pacte de Bagdad. En avril 1955, elle participe à la conférence de Bandoeng et affiche son neutralisme. Pourtant elle achète des armes à l’URSS pour parer aux incidents frontaliers qui se multiplient avec Israël et à la menace que peuvent représenter les troupes turques et irakiennes à ses frontières. Le 7 août 1957, après avoir vainement tenté d’obtenir des armes de Occident, et pour se protéger les menaces israéliennes, turques et irakiennes à ses frontières, le gouvernement syrien signe un traité d’assistance économique et technique avec Moscou.
8. La République Arabe Unie
En février 1956, dans un contexte de tensions récurrentes avec Israël et afin de parer à la menace de l’Irak rallié au Pacte de Bagdad, le parti Baath demande l’union avec l’Egypte. La nationalisation du Canal de Suez par Nasser et l’intervention tripartite renforcent les liens entre Damas et Le Caire et accentuent le virage à gauche de la politique syrienne. Le 13 octobre 1957, un contingent égyptien débarque à Latakieh. Le maréchal Abdel Hakim Amer, bras droit de Nasser, devient le commandant en chef des armées des deux pays.
Nasser impose la centralisation du nouvel Etat, la dépolitisation de l’armée syrienne, et l’extension à la Syrie du système de parti unique en vigueur en Egypte. En Syrie, les avis sont partagés : le président Kouatly et le chef du gouvernement hésitent à remplir les conditions posées par l’Egypte. Enfin, le 31 janvier 1958, suite à l’intervention de Michel Aflak, les deux parties arrivent à un accord, et, le 1er février 1958, la République Arabe Unie est officiellement proclamée. Le 21 février, elle est plébiscitée par 98% des Syriens et la Syrie devient la province Nord du nouvel Etat.
A la fin de l’été 1959, un Comité Militaire Baathiste (CMB) est fondé par cinq officiers syriens en poste en Egypte : Mohammad Oumran, Salah Jédid, Hafez el-Assad, Abdel Karim el-Joundi et Ahmad el-Mir. Le Baath ne sait rien de la création du comité qui comptera rapidement une quinzaine de membres. Fin décembre 1959, une campagne anti-baathiste est organisée par le maréchal Abdel Hakim Amer, proconsul égyptien en Syrie ; elle provoque la démission de tous les ministres baathistes.
9. L’Infisal – restauration de la démocratie parlementaire
Le 28 septembre 1961, l’expérience de la RAU prend fin suite à un coup d’Etat militaire à Damas, dirigés par le colonel Abdel Karim Nahlawi. Une Constitution provisoire est promulguée, et les élections du 1er décembre 1961 ramènent la bourgeoisie traditionnelle au pouvoir, avec Nazem Koudsi chef de l’Etat, Ma’moun Kouzbari président de la Chambre des députés et Maarouf Dawalibi président du Conseil. Face à la propagande entretenue depuis le Caire par la Voix des Arabes contre un régime jugé « séparatiste », les dirigeants syriens concluent des accords de défense avec l’Irak de Kassem, notamment un traité signé le 16 mars 1962 qui met en place un commandement militaire commun. Le 28 mars 1962, le colonel Nahlawi fait arrêter les dirigeants syriens. Le pouvoir de Nazem Koudsi est rétabli dont la priorité est la lutte contre les unionistes pro-nassériens. Un gouvernement provisoire est formé sous la direction de Béchir Azmé, il sera suivi par un autre dirigé par Khaled el-Azm.
10. L’arrivée du Baath au pouvoir
Le 8 février 1963 se produit un coup d’Etat baathiste en Irak. Un mois plus tard, le 8 mars 1963, c’est au tour de la Syrie de connaître un coup d’Etat initié par le général sunnite Ziad Hariri, qui affiche des principes très proches du Baath. Les manifestations pro-nassériennes sont réprimées et de larges purges sont effectuées dans l’armée contre les officiers nassériens, ce qui aura pour effet de promouvoir à des postes clés des officiers issus des minorités confessionnelles, druzes et alaouites. En juillet 1963, le général Amine al-Hafez prend la direction du CNCR, remplaçant le général Lu’ayy al-Atassi qui en a été écarté pour avoir tenté de négocier avec Nasser.
Le congrès de septembre 1963 du Baath consacre la montée en force des régionalistes aux dépens des chefs historiques du parti et des militaires aux dépens des civils. Ces adeptes d’un socialisme plus affirmé sont encadrés par Youssef Zouayyen (sunnite), Noureddin Atassi (sunnite) et Ibrahim Makhos (alaouite) qui ont tous les trois participé à la guerre d’indépendance algérienne. En octobre 1963, le 6ème Congrès National du Baath consacre la radicalisation du parti avec l’introduction de nouveaux concepts : démocratie populaire, parti-guide, nationalisations. Au début de l’année 1964, les Frères Musulmans appellent à la protestation contre le nouveau régime considéré comme un régime athée. Ils sont les alliés de la bourgeoisie syrienne sunnite durement touchée par la vague de nationalisations. Des troubles, opposant sunnites et alaouites, éclatent à Banias, Hama, Homs, Idlib et le reste du pays, et sont durement réprimés. Devant l’ampleur des oppositions, le Baath déclare l’Islam religion d’Etat et le capitalisme partenaire économique. Le pouvoir législatif est dévolu au CNCR et le pouvoir exécutif à un Conseil présidentiel de 5 membres : Amine el-Hafez, Salah Bitar, Mansour el-Atrache, Mohammed Oumrane et Noureddine Atassi. La modération affichée par le régime se dissipe vite et les nationalisations de tous les secteurs d’activité économique sont imposées par un pouvoir qui se resserre de plus en plus autour des militaires, alaouites pour la plupart.
12. Le coup d’Etat du 23 février 1966
Les modérés écartés de la direction des affaires du pays, un autre conflit apparaît au sein de l’armée : il oppose le sunnite Amine el-Hafez à l’alaouite Salah Jédid qui tente d’écarter l’armée de la vie politique. Le 23 février 1966, un coup d’état est mené par les militaires baathistes. Noureddine Atassi, sunnite, devient président de la République et secrétaire général du parti Baath. Youssef Zouayyen, sunnite également, est chef du gouvernement et Ibrahim Makhos, alaouite, occupe les fonctions de vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères. Mais la réalité du pouvoir est entre les mains des militaires (Salah Jédid, Hafez el-Assad, Ahmad Swaydani, Abdel Karim el-Joundi).
Le nouveau pouvoir lance des grands travaux financés par l’URSS et les pays du bloc socialiste. La Syrie et l’Egypte signent un traité de coopération militaire le 4 novembre 1966.
Début septembre 1966, les druzes sont écartés de l’armée et de l’administration suite au coup d’Etat manqué du colonel Salim Hatoum. La guerre des Six jours (5 au 11 juin 1967) aboutit à la prise du plateau du Golan par Israël. Le 17 juillet 1968, le Baath revient au pouvoir à Bagdad mais la rupture est totale entre le Baath irakien, resté fidèle à la vieille garde, et le Baath syrien.
13. La prise de pouvoir par Hafez el-Assad
Une scission claire éclate entre Salah Jédid et Hafez el-Assad qui prône la coopération militaire avec tous les autres pays arabes, regrette l’isolement de la Syrie et veut tenir l’armée syrienne à l’écart des questions politiques. Critiqué pour sa position neutre lors la répression des organisations palestiniennes par le roi Hussein en septembre 1970, Hafez el-Assad place tous les responsables du parti en résidence surveillée et devient, le 13 novembre 1970, le nouveau maître de la Syrie. Dès le 30 janvier 1971, Assad se rend à Moscou, puis fait adhérer la Syrie à l’Union Tripartite qui comprend déjà l’Egypte, la Libye et le Soudan. Sur le plan intérieur, Assad annonce des mesures de libéralisation du régime (retour en grâce des communistes et nasséristes, organisation générale des Zones franches économiques dans les villes, ports et aéroports afin d’encourager le secteur privé).
Le 12 mars 1971, Hafez el-Assad est élu président de la République pour 7 ans, au suffrage universel, avec 99,2% des voix. Le Front progressiste d’union nationale est créé, qui regroupe autour du Baath les partis politiques tolérés en Syrie : l’Union socialiste arabe de Jamal Atassi (nassériens), le Mouvement des unionistes socialistes de Jamal Soufi, le Mouvement des socialistes arabes d’Akram Hourani et le Parti communiste de Syrie.
14. Assad et le conflit israélo-arabe
Le 8 septembre 1972, en riposte aux assassinats des athlètes israéliens lors des jeux Olympiques de Munich, Israël bombarde le Liban et la Syrie, et, le 30 octobre 1972, l’aviation israélienne touche des cibles civiles et militaires près de Damas et à Homs.
La guerre du Kippour est déclenchée le 6 octobre 1973 à l’initiative de la Syrie et de l’Egypte. La contre-offensive israélienne s’organise à partir du 9 octobre. L’aviation israélienne cible les pôles économiques syriens : raffineries de Homs, centrale de Qatina, ports de Tartous et de Latakieh. Le 21 octobre 1973, l’Egypte accepte un cessez-le-feu en échange d’un retrait israélien et de la tenue d’une conférence internationale pour une solution globale auMoyen-Orient. Cette décision unilatérale du président Sadate survient alors qu’Assad prépare avec les Irakiens (les deux pays se sont réconciliés après le déclenchement de la guerre) une grande offensive pour le 23 octobre. Pourtant il est contraint d’accepter ce cessez-le-feu car la défection égyptienne laisse la Syrie seule face à Israël.
En juin 1974, le président américain Richard Nixon se rend à Damas. A Bagdad, on critique les régimes arabes « traîtres » qui reçoivent le président des Etats-Unis.
15. La Syrie et la guerre du Liban (1975-1990)
Les troupes régulières de l’armée syrienne entrent au Liban au matin du 1er juin 1976 en renforts aux milices chrétiennes du Front libanais menacées sur tous les fronts de la montagne par les Forces communes constituées par les milices de la gauche libanaise et les combattants de la révolution palestinienne. L’intervention syrienne aura ainsi pour effet de mettre un terme aux « événements » du Liban en octobre 1976. Pendant plus d’un an, une accalmie va régner sous l’œil vigilant des troupes de la Force arabe de dissuasion mandatées par la Ligue des Etats arabes, et dont la Syrie assure le gros des troupes.
La décision du président Assad de faire intervenir son armée au Liban auprès des milices chrétiennes produit un fort mécontentement dans la population syrienne, dont la grande majorité est composée de sunnites fervents partisans de la cause palestinienne, et très sensibles à la prédication des Frères musulmans syriens. Des troubles éclatent dans les grandes villes du pays, que l’Etat va s’employer à circonscrire jusqu’en 1984 : la ville de Hama, bastion des Frères musulmans, est bombardée à l’artillerie lourde en février 1982. De son côté, le président Assad tente de persuader les cadres du parti Bath du bien-fondé de sa stratégie : il faut brider l’OLP afin de l’empêcher d’entraîner la Syrie dans un conflit contre Israël ; il faut porter secours aux chrétiens du Liban afin de les dissuader de poursuivre des liens déjà ébauchés avec l’Etat d’Israël. L’alliance entre la Syrie et les milices chrétiennes se révèle éphémère s’éteint à la suite des accords de Camp David et de la paix séparée entre l’Egypte et Israël. Dès lors, les années 1978-1981 sont celles d’un conflit entre l’armée syrienne et les milices chrétiennes, désormais appelées Forces libanaises et commandées par Béchir Gemayel.
En juin 1982, l’invasion du Liban par Israël (opération Paix en Galilée) pousse les troupes syriennes à se replier jusqu’aux confins de la plaine de la Békaa. Patiemment, la Syrie va regagner ses positions en profitant des échecs d’Israël au Liban. Après l’assassinat de Béchir Gemayel le 14 septembre 1983, son frère et successeur, Amine Gemayel, abroge l’accord israélo-libanais signé le 17 mai 1983 avec Israël. Les Etats-Unis et la France retirent leurs forces d’interposition, à la suite des attentats du 23 octobre 1983, faisant 241 morts américains et 57 français.
En février 1987, les troupes et les services de renseignements syriens réinstallent leur quartier général au cœur de la capitale libanaise, afin de ramener le calme entre ses alliés (Amal, Hezbollah, Parti socialiste progressiste, Palestinienne) qui se livrent une lutte pour le contrôle de Beyrouth-Ouest et la banlieue sud de la capitale.
En 1989-1990, le général Aoun déclenche trois guerres. Début 1989, il tente de mettre au pas la milice des Forces libanaises et son chef Samir Geagea, sans succès. Une seconde guerre commence le 14 mars 1989, en réponse à un bombardement syrien des zones chrétiennes, c’est la guerre de Libération contre la présence syrienne. Elle se termine grâce à l’accord de Taef en octobre 1989. réorganise les institutions de l’Etat libanais et permet l’élection d’un nouveau président de la République. Refusant de se plier à l’accord entre le Liban et la Syrie et de quitter le palais présidentiel, il déclenche, fin janvier 1990, une nouvelle guerre contre les Forces libanaises.
Au matin du 13 octobre 1990, à la demande du pouvoir libanais représenté par le président Elias Hraoui, les troupes syriennes investissent les régions chrétiennes et le palais présidentiel de Baabda et opèrent de multiples arrestations.
16. Avènement de Bachar el-Assad
En juillet 2000, après le décès de son père, Bachar el Assad accède à la présidence. Un début de libéralisation économique et politique se met en place, vite mis en veilleuse en raison des menaces extérieures : occupation américaine de l’Irak en 2003 accompagnée par les accusations américaines contre la Syrie d’aide aux insurgés irakiens, afflux d’un plus d’un million de réfugiés fuyant l´Irak, assassinat le 14 février 2005 du premier ministre libanais Rafik Hariri et désignation de la Syrie, par la communauté internationale d’être l’instigateur de cet assassinat, obligation des forces syriennes de quitter le Liban un mois après cet attentat, … En mars 2011, les manifestations de Deraa marquent le début de la guerre en Syrie.
Source : http://www.lesclesdumoyenorient.fr/Syrie.html