Inauguration du Memorial Act

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INAUGURATION DU MEMORIAL ACTE, LIEU DE COMMEMORATION ET DE RECONCILIATION


1. Le Memorial Acte

Des racines d’argent sur une boîte de granit noir : c’est ainsi que l’on pourrait résumer l’architecture ultramoderne du Mémorial ACTe, Centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite et de l’esclavage, complexe majestueux qui réunit sur 7 125 m², exposition permanente, exposition temporaire, boutiques, librairies, centre de recherche, médiathèque… La boîte noire qui abrite les salles d’exposition représente le socle renfermant la richesse que constitue la connaissance du passé et sur lequel se construit en partie la mémoire collective. Le granit noir est incrusté d’une constellation d’éclats de quartz doré, représentant les âmes des millions de victimes de la traite négrière et de l’esclavage. Les racines d’argent évoquent la quête des origines à laquelle renvoie l’histoire de la traite et de l’esclavage et suggèrent une croissance, un élan, un mouvement, qui invitent la communauté guadeloupéenne, forte du partage de son passé fondateur, à rayonner sur le monde. Au total, Mémorial ACTe est le passé qui permet de mieux appréhender le présent et de se tourner vers le futur. Le Mémorial ACTe veut participer à la création d’une mémoire collective et encourager la recherche sur la traite négrière, l’esclavage et leurs abolitions. Il s’agit ainsi de contribuer par la connaissance, la culture et la création à la fermeture des blessures d’une histoire marquant l’édification de la société guadeloupéenne comme celles de la Caraïbe et des Amériques. Le Mémorial ACTe sera un lieu pour apprendre, se recueillir, (re)chercher une histoire désormais commune à l’humanité. Le projet sera donc ancré sur la mémoire de la traite et de l’esclavage, mais aussi tourné sur les expressions qui en sont nées et qui en naissent aujourd’hui. C’est avant tout un lieu de réconciliation, de promotion d’un nouvel humanisme et d’entente entre les peuples et les nations. Le Mémorial ACTe a été conçu et pensé pour être non seulement un lieu de mémoire, mais aussi un espace ouvert et dédié à la diversité des expressions artistiques et culturelles du monde contemporain.


2. Inauguration

L’inauguration du Memorial Act s’est déroulé le 10 mai 2015, date de commémoration nationale de l’abolition de l’esclavage, en présence de quatre chefs d’État (François Hollande de France, Macky Sall du Sénégal, Ibrahim Boubacar Keita du Mali, et Michel Martelly d’Haïti), de quatre ministres français (Christiane Taubira, ministre de la justice, Fleur Pellerin, ministre de la culture, George Pau-Langevin, ministre des outre-mer, Ségolène Royal, ministre de l’écologie, Annick Girardin, secrétaire d’Etat au développement et à la francophonie), du présient de l’assemblée nationale française (Claude Bartolone)et d’une quinzaine de chefs de gouvernement et de ministres de la Caraïbe. La secrétaire de l’Organisation internationale de la francophonie, l’haïtienne Michaëlle Jean, était également présente, ainsi que de nombreuses autres personnalités : Roger Bambuck, Patrick Karam, Firmine Richard, Lilian Thuram, …
Quelque 1 200 personnes ont écouté, sur le parvis du Mémorial ACTe, les discours de Jacques Bangou, Victorin Lurel et François Hollande.
Jacques Bangou, maire de Pointe-à-Pitre, a souligné comment le site de Darboussier, fleuron de l’industrie sucrière passée, était l’exemple d’un projet, le Memorial Acte, ayant su transcendé l’exploitation ouvrière et ne retenir que la solidarité des hommes. S’adressant aux chefs d’Etats africains, il a vu en leur déplacement en Guadeloupe la symbolique du voyage naguère imposé aux esclaves africains.
Victorin Lurel a d’abord rappelé que « Enfermés dans la calebasse de nos îles, en quête de nous-mêmes et de boussole pour notre devenir collectif, il nous parait essentiel de mieux concevoir notre rapport à la mémoire et à l’histoire. Mémoire douloureuse et longtemps honteuse, faite de ressentiment et de rejet, créant dissonance, schizophrénie, et errance identitaire, il fallait une catharsis pour réinsuffler de la fierté et autoriser l’affiliation et la coalescence des descendants à leurs aïeux ». Le Président de région a indiqué que le MACTe sera « un haut lieu d’expressions artistiques et culturelles ouvert aux cris et aux chants du monde contemporain, poreux à tous les vents de la liberté et de la dignité, tout autant qu’un espace dédié à l’enseignement et à la recherche, en lien permanent avec les universités… Le Mémorial Acte qui ne sera pas un lamentarium refuse tout enfermement mémoriel, refuse de faire du passé une prison, récuse toute vision ethnocentriste, racialiste ou coloriste, postule un homme ouvert et poreux à tous les souffles du monde, sans jamais pour autant renier origines et filiations. Par une démarche faîte de pardon et de vérité, de réconciliation, de connaissance, de recherche d’enseignement, de commémoration, de mémoration, de remémoration, d’humanisme, le Mémorial se veut un sémaphore de l’Universel en plein cœur de la ville de Pointe-à-Pitre. Un bâtiment-paraclet et propitiatoire en bord de mer pour la réhabilitation et la réintroduction de l’homme total ».
François Hollande s’est insurgé contre les « nouveaux négriers » qui œuvrent en Méditerranée pour faire passer des migrants. Mais il a écarté tout amalgame entre l’esclavage passé, système légal, et les formes présentes d’esclavage, condamnées par les institutions internationales : « La seule dette qui doit être réglée, c’est de faire avancer l’humanité. C’est ce que ce Mémorial (ACTe) nous rappelle ». S’adressant au président haïtien Michel Martelly, F. Hollande a dit sa fierté de le voir participer à ce 10 mai et souligné « l’exceptionnel combat pour la liberté d’Haïti, première colonie libre, première république noire ayant fait échec au rétablissement de l’esclavage par Napoléon en 1802 ». Haïti a dû verser une « rançon d’indépendance » à la France jusqu’au milieu du XXe siècle. « Eh bien, quand je viendrai à Haïti, j’acquitterai à mon tour la dette que nous avons ». Le Mémorial ACTe « a vocation, en évoquant le passé, de prévenir les fléaux qui menacent et notamment le poison du racisme ». F. Hollande a aussi rappelé les étapes qui ont jalonné le travail de mémoire dans le pays : loi Taubira en 2001 sur la reconnaissance de la traite et de l’esclavage comme crime contre l’humanité ; loi de 2013, qui introduit dans le code pénal la définition de la traite, de l’esclavage, et de la servitude. « La France toute entière est engagée dans cette reconnaissance au-delà des sensibilités et des philosophies. La France est capable de regarder son histoire, parce que la France est un grand pays qui n’a peur de rien et surtout pas d’elle même » ajoute François Hollande. Le Président a ensuite consacré un long passage de son discours à l’histoire souvent occultée des actes de créativité, des révoltes, et des rébellions des esclaves qui ont finalement pris « leur part dans leur libération ».P. Gbikpi

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