Rencontre avec Florelle Benjamin
Florelle BENJAMIN, retraitée des Affaires Maritimes et vivant à Capesterre-Belle-Eau, est l’auteur du récit « Ainsi.. soit sans fils » (Editions Nestor, 2012) où elle donne le témoignage de l’ensemble des violences qui ont surgi dans sa vie de famille : violence physique (femme battue, enfants martyrisés, …) et violence morale (insultes, remontrances, manipulation mentale, jalousie, …) plus sournoise mais tout autant destructrice de l’équilibre psychique. Florence Benjamin nous aide à mieux comprendre la maltraitance familiale afin de mieux nous en débarrasser.
« Tiphène, jeune menuisier ébéniste, se mourait d’amour pour moi, et c’était réciproque. Nous nous aimions d’un amour profond mais c’était sans compter sur les préjugés raciaux, les médisances des uns, les mauvaises langues des autres. Le jour qu’il expédia une demande en mariage sur papier timbré, Sosthène ma mère déchira la missive en miettes et ne me souffla mot ». Afin de mettre fin à cette idylle, ses parents décide de l’envoyer chez un de ses oncles, en France. Son long calvaire commence alors. La famille l’accueille avec froideur et hostilité, lui donnant un coin du meuble de salon pour couchette et retenant, pour couvrir le coût de ses repas, une partie du salaire du travail de petite dactylo, qu’elle a déniché. Au bout de quelques mois, son oncle vient à son travail et lui annonce : « Je te donne deux jours pour trouver un logement, sinon tu coucheras dehors ». Elle trouve heureusement une chambre dans un foyer où elle passe Noël seule, avec une camarade du foyer, antillaise comme elle. Le hasard l’amène alors à rencontrer Elmer qui tisse avec elle une profonde « amitié » et finit par lui proposer de partager son domicile situé dans Paris.
Les mois passent et Florelle tombe enceinte puis, après s’être mariée avec Elmer, accouche d’une magnifique petite fille. Hélas, Elmer, au lieu d’être un père comblé, devient incroyablement haineux et violent avec le bébé : « Il se leva soudain et gifla l’enfant dans son berceau… Il lui enfonça le biberon dans la bouche jusqu’au goulot… Il lui asséna un coup sur la bouche avec le plat de la main… Il s’empara du bébé, la déshabilla et la jeta dans la baignoire remplie d’eau, se délectant de la voir se noyer… ». Elmer est animé par une double colère : la déception de ne pas avoir eu un garçon et le soupçon que le père de l’enfant soit un autre homme (« J’ai la peau trop claire pour qu’elle soit aussi foncée »). Le deuxième bébé, une fille à la peau très claire, et le troisième, encore une fille à la couleur de peau qui ne va toujours pas, sont tout aussi mal accueillis par leur père. Ses violences iront crescendo : il attache une fillette toute une nuit, nue, sur une chaise, dans le froid glacial du salon ; il brûle le dos d’une autre avec le fer à repasser ; il arrose le bébé d’eau glacée dans la baignoire ; pour des motifs futiles, il frappe sauvagement ses filles avec la rallonge électrique ; il les force à manger le matin un mélange de lait chaud et de beurre, à midi un croûton de pain et un yaourt, et le soir, une soupe grossière ; … Florelle mettra fin à son calvaire et à celui de ses filles en prenant la fuite pour aller se réfugier chez sa mère en Guadeloupe où elle reviendra en 1983, onze ans après en être partie, et y refera sa vie.
L’enfance d’Olmer est elle aussi faite d’une extraordinaire violence. Sa sœur et lui sont mis par leur mère dans une famille de propriétaires terriens où elle sera ménagère et lui ouvrier en charge des animaux de la ferme. Sa sœur, qui aura un enfant avec le fils des patrons, sera séparée de son enfant qui appellera la patronne « maman » et sa vraie mère « madame ».
Aujourd’hui, revenant sur les terribles années de sa vie, Florelle Benjamin cherche à comprendre les causes du martyr qu’elle et ses filles ont vécu. Au début, il y a l’absence complète de dialogue entre elle et ses parents. S’ils avaient pu s’asseoir autour d’une table et discuter, elle aurait pu les amener à considérer Tiphène pour ce qu’il était, un jeune homme travailleur et honnête, et non sous l’angle des préjugés, renforcés par les propos malveillants des voisins et des oncles. Ensuite, il y a ce terrible mirage qu’est l’Occident et qui fait croire aux parents qu’y envoyer leurs enfants ne pourra que contribuer à leur bien, oubliant que rien ne peut remplacer l’amour et la proximité de la famille. Il y a aussi les parents, qui ont tendance à accorder une importance exagérée aux commentaires de leur entourage, alors que c’est à eux et eux seuls que Dieu a confié leurs enfants et que ce n’est que dans le secret de leur conscience qu’ils trouveront les vraies réponses. Florelle en vient aux relations au sein du couple, avant et après le mariage. Au début de leur relation, les jeunes devraient apprendre à se connaître dans la prudence et la chasteté, qui seules peuvent leur permettre de se connaître et de garder à tout moment la liberté de rompre s’ils constatent un manque d’affinité entre leurs personnes. Une fois le mariage décidé, celui-ci doit être nourri en permanence par les 3 « P » : la prière, le partage et le pardon. En effet, le mariage vécu à trois (l’homme, la femme et Dieu) est comme la corde à trois fils : il est incassable.